Friday 17 April 2009

Charles Baudelaire

À une passante.

La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;

Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?

Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !

From: les fleurs du mal.


Translation:

In Passing.
The traffic roared around me, deafening!
Tall, slender, in mourning - noble grief -
a woman passed, and with a jewelled hand
gathered up her black embroidered hem;

stately yet lithe, as if a statue walked . . .
And trembling like a fool, I drank from eyes
as ashen as the clouds before a gale
the grace that beckons and the joy that kills.

Ligthening . . . then darkness! Lovely fugitive
whose glance has brought me back to life! But where
is life - not this side of eternity?

Elsewhere! Too far, too late, or never at all!
Of me you know nothing, I nothing of you - you
whom I might have loved and who knew that too!

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